"Le sabre et la vertu"
paru dans le numéro 13 du magazine "Self & Dragon" (décembre 2021)

 

          La réflexion que je propose dans le magazine « Self & Dragon » N°13 (décembre 2021) s’intitule « Le sabre et la vertu ». Ces pages seront les dernières de ma rubrique « Fondamentalement martial » que j’y alimentais depuis ces dernières années. Elles font référence au proverbe chinois, que tout pratiquant d’art martial devrait connaître (et comprendre) : « Qu’importe la longueur du sabre si l’homme ignore la vertu »…

          Parce que j’estime que la manière de pratiquer le « martial », depuis les 60 ans que je les vois évoluer, s’est bien trop laissée gangrener par la problématique de la « longueur du sabre » (une façon imagée de référer à ce qui touche à la seule question technique dans le martial), dans une surenchère effrénée, en occultant complètement la finalité ultime de la démarche traditionnelle du Budo (ou du Wushu chinois), à savoir la découverte et le respect de la vertu (référence au sens de la technique martiale, à son message éducatif) : ce Butoku, ou Wu-de, faite d’humilité, de respect, de droiture, de loyauté, de courage, d’aspiration à la non-violence. Ce que devrait être l’apprentissage « juste » d’un art de guerre devenant  art de la paix. Le même sens de la Voie...

          Qui pense encore aujourd’hui à ce qui devrait être le souci permanent et l’objectif ultime de chaque pratiquant, au-delà de la course aux grades, des coupes et des hochets divers pour la seule affirmation de l’ego et le profit de systèmes qui se nourrissent grassement de cette dérive ? C’est que nous en aurions tellement besoin d’un retour à cette vertu pour aider, dans et à partir de nos dojos, à reconstruire une société apaisée. Derrière d’authentiques Sensei, concernés par la sensibilisation à cette vertu martiale. Serions-nous déjà bien trop loin d’une telle ligne d’horizon ? Ou n’aurions-nous plus (assez) de Sensei authentiques, prêchant pas l’exemple et dans la durée ? Ou plus aucune aspiration à cet idéal proposé par la route martiale ? Définitivement aveuglés par le « miroir aux alouettes » ? Dans ce cas, quelle tristesse, et aussi quel rendez-vous manqué…

 « Celui qui se polarise sur la technique perd la Voie »
                                                                                  Anzawa Heijiro, Kyudo, 1887-1970).

Roland Habersetzer

 

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